Culture de morilles sous serre : voici les bases pour se lancer
Quand on pense à une serre, on imagine une culture de type potager, ou parfois plutôt des plantes d’ornement, voire même un petit coin détente au soleil, duquel on peut profiter même en hiver. Mais saviez-vous qu’une serre pouvait servir à cultiver des champignons ? Et plus étonnant encore, qu’elle peut abriter une culture de morille ? Voici toutes les infos pour le futur myciculteur qui sommeille en vous !
Pourquoi cultiver des morilles ?
Les morilles sont des champignons, particulièrement reconnaissables avec leur chapeau composé de multiples alvéoles. Selon les espèces, leur couleur peut aller du blond au noir, en passant par le gris et le roux. Bien que toxiques, ces champignons deviennent comestibles et même très goûteux après cuisson, ce qui les rend très prisés, notamment dans les grands restaurants, qui se les procurent au prix fort ! Car ce champignon a un prix au kilo supérieur à celui du cèpe, c’est l’un des plus chers au monde, bien sûr loin derrière la truffe. La morille à l’état naturel pousse essentiellement au printemps, une période courte qui renforce sa rareté et par conséquent sa valeur. Bien que cultiver des champignons puisse être facile pour certaines espèces, cela reste très compliqué pour d’autres, et même impossible pour beaucoup comme les girolles, les cèpes, les chanterelles ou encore les truffes. En ce qui concerne les morilles, c’est réalisable mais difficile. Étant donné leur valeur, l’intérêt principal est économique, qu’il s’agisse d’une culture pour une consommation personnelle ou pour en faire commerce. Cela peut aussi avoir un intérêt environnemental : ce produit étant cher, on le fait parfois venir de très loin, et les populations naturelles sont récoltées de manière excessive. Sans compter la fierté d’avoir réussi à faire pousser ce trésor !
Quels sont les besoins spécifiques des morilles ?
Les morilles ont des besoins particuliers, elles poussent dans des conditions spécifiques et précises qu’il est difficile de reproduire. L’humidité et la température notamment, doivent être soigneusement contrôlées, mais aussi la luminosité, la ventilation, ou encore la quantité de nutriments dans la terre. La pluie et le vent ne sont pas compatibles avec une culture prospère. C’est pourquoi, afin de pouvoir surveiller et ajuster tous ces paramètres, la culture de morilles sous serre est indispensable.
La température
La température de l’air doit se situer entre 10°C et 20°C pour le semis, des conditions qui ne se retrouvent habituellement qu’une partie de l’année, comme le printemps et l’automne. Il faut pouvoir descendre jusqu’à 5°C au moment de la fructification. Les conditions spécifiques de température peuvent nécessiter de chauffer une serre pour les maintenir.
L’humidité
La production des morilles nécessite un niveau d’humidité important. Il est impératif de vérifier que le sol reste constamment humide, mais il ne faut pas qu’il ne le soit trop non plus, ce qui pourrait faire pourrir le mycélium. En ce qui concerne l’arrosage, il doit être le plus doux possible, c’est pourquoi il est préférable d’utiliser un système goutte-à-goutte ou mieux encore, la brumisation. Cette technique permet de conserver une humidité constante mais légère. L’eau d’arrosage a son importance. Comme pour l’irrigation des cultures de manière générale, il est préférable d’opter pour de l’eau de pluie. Celle-ci est bien moins polluée.
La lumière
Au printemps et en automne, les températures sont plus douces en journée mais encore fraîches la nuit, un écart qui provoque une importante condensation dans les serres de jardin et donc augmente l’humidité. L’hiver le risque de condensation existe mais dans une moindre mesure car l’air froid retient beaucoup moins l’eau que l’air chaud.
Le pH
Le pH du sol doit être entre 7 et 8. S’il est trop élevé ou trop peu, il peut et doit être ajusté. L’apport de carbonate de calcium ou de cendre permet de réduire l’acidité (d’augmenter le pH), l’ajout de soufre ou de sulfate d’aluminium permet d’augmenter celle-ci (et donc de réduire le pH). Il est nécessaire de pouvoir analyser le sol, grâce à des bandelettes ou un appareil de mesure.
La composition du substrat
Le substrat doit être aéré et ne doit pas contenir de tanins ni de restes de matières organiques non décomposées, et bien sûr pas de reste de produits chimiques qui vont perturber le fragile équilibre du sol. Certaines espèces de morilles sont mycorhiziennes, c’est-à-dire qu’elles se nourrissent en partie grâce à l’aide d’une plante hôte, mais la morille cultivée en France est généralement issue d’une espèce saprophyte.
Cela signifie qu’elle puise les éléments nutritifs dont elle a besoin dans la matière organique en décomposition, mais à un stade déjà avancé. Son substrat peut donc être du bois décomposé, du fumier de deux ou trois ans, ou encore du compost. Il faut savoir que la composition du substrat influence le futur goût de la morille.
Quelle serre choisir pour cultiver des morilles ?
Évidemment pour mettre en place une culture morille sous serre, le producteur doit se procurer une serre de jardin. Est-ce que toutes les serres se valent pour cet objectif ? Vous pouvez effectuer votre culture dans une serre en verre comme dans une serre en polycarbonate ou une serre à bâche. Mais étant donné que l’esthétique n’est pas l’effet recherché, et que la culture de morilles va nécessiter plusieurs investissements en matériels et consommables, il est préférable d’opter pour une serre tunnel, plus économique.
Les dimensions de la serre vont dépendre des objectifs de culture : les particuliers qui souhaitent se lancer pour leur consommation personnelle n’auront pas besoin d’une structure aussi grande que ceux qui veulent gagner leur vie avec cette activité.
Toutefois, la serre dans laquelle vous cultivez vos champignons peut servir à d’autres cultures, que ce soit simultanément ou à un autre moment de l’année, ce qui peut justifier l’acquisition d’une serre plus importante. Un tunnel haut représentera un volume plus conséquent à chauffer le cas échéant.
Quelles sont les différentes étapes ?
La toute première étape dans la culture de morilles est de se procurer le matériel. Une fois votre structure installée et tous vos appareils de gestion de la température, de la luminosité, de l’hygrométrie et du pH prêts, les choses sérieuses peuvent commencer.
Préparer le sol
Le but est de recréer le milieu naturel du champignon, par conséquent, il est nécessaire de :
- aérer le sol tout en laissant des mottes de terre ;
- créer des plates-bandes légèrement plus hautes que le niveau du sol pour aider à l’évacuation de l’eau en excès ;
- éliminer les mauvaises herbes par des méthodes non chimiques : manuellement, avec des faux-semis…
- tester et ajuster éventuellement le pH grâce à l’ajout de matières acidifiantes ou alcalinisantes ;
- bien irriguer le substrat.
Mettre en place le mycélium
Le mycélium se trouve facilement sur internet, l’important étant de veiller à sa qualité. Si vous ne comptez pas l’utiliser tout de suite (ce qui reste la meilleure option), il faut le stocker au frais dans son sac d’origine (pas plus de 2 ou 3 degrés).
C’est le bon moment lorsque la température à 10 cm du sol reste de manière assez constante entre 10 et 20°C. On peut semer le mycélium à la volée ou par poquets. Dans le premier cas, on dissémine environ 300 g de mycélium pour un mètre carré de surface, que l’on recouvre ensuite de quelques centimètres du substrat. Dans le deuxième cas, on réalise des trous d’une dizaine de centimètres de profondeur tous les 50 cm, au fond desquels on dépose 100 g de mycélium avant de le recouvrir.
Surveiller sa culture
La surveillance est essentielle pour pouvoir ajuster les paramètres en cours de route et garantir une bonne croissance de vos morilles.
Une à trois semaines après la mise en place du mycélium, des cercles doivent apparaître au sol, confirmant que le mycélium se développe. Par la suite, des nutriments supplémentaires seront nécessaires pour satisfaire vos champignons. Il faudra alors fournir de la nourriture en sacs, articles que l’on trouve aussi sur internet. Ils seront laissés en place jusqu’au printemps. On peut aussi utiliser des pommes cuites.
L’arrosage doit être régulier mais très mesuré. Surveillez l’apparition d’insectes ou de moisissures et si vous constatez des nuisibles, n’utilisez que des méthodes naturelles pour vous en débarrasser (comme l’utilisation d’insectes prédateurs ou de bactéries ciblées, qui se fait beaucoup en agriculture biologique). Lorsque les températures remontent, un arrosage plus prononcé aidera à la fructification.
Récolter !
Si vous avez bien travaillé, vous récolterez ces petits trésors d’à peine 10 cm entre les mois de mars et mai, voire juin selon la région. Il vous faudra pour cela un couteau bien propre pour couper le champignon à sa base. Leur stockage se fera de manière aérée et leur nettoyage devra être particulièrement délicat, car elles sont très fragiles. Le séchage permet une plus longue conservation.
Alors, cultiver des morilles dans votre serre vous tente ? C’est un défi technique mais tout à fait réalisable avec de la volonté, de la passion et de la rigueur. Et un vrai régal à la clé !
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